Du Jardin à la Chapelle anglicane

(14 décembre 2019)

Nous avons commencé à visiter Minorque dans les années 1990 et nous observions à chaque
fois comment cette île hospitalière devenait toujours plus grande, comme le château de la
Belle au Bois dormant.
Au cours d’une de nos visites estivales, nous avions lu dans Roqueta un article sur le projet
de restauration des édifices originaux de l’Hôpital de l’Ile du Roi et nous y avons fait une
visite en août 2010.

J’ai commencé à collaborer en tant que volontaire aux vacances d’été suivantes. Je travaillais
comme professeure et je visitais Minorque aussi souvent que possible… J’ai passé de
nombreuses heures à sarcler les mauvaises herbes.
Ce qui m’intéressait en particulier, c’étaient les fragments de céramique qui avaient été
exhumés par Mike Puttock et son équipe en déblayant le terrain pour le futur jardin. Avec,
aujourd’hui, le puits, l’arrosage, les plants de romarin etc.
Au Royaume-Uni, ma maison se trouve à Stoke-on-Trent, plus connue comme « The
Potteries ». Je savais que le Musée des Céramiques et Galerie d’Art avait été impliqué dans
l’identification des fragments de céramique découverts lorsque les fouilles se sont terminées
pour le nouveau cimetière de Sol del Este.
J’ai rapporté quelques-uns de ces fragments à Stoke et j’ai découvert que nous avions des
restes de céramique de la région de Stoke, ainsi que d’Italie, de Chine et d’Espagne, du XVIIIe
au début du XIXème siècle.
La céramique anglaise fut décrite comme « bourgeoise », suggérant qu’elle avait appartenu à
la classe des officiers qui avaient passé un certain temps sur l’île.
Un autre sommet pour moi fut de découvrir que « Pierre Biard né à Tours » -le graffiti inscrit
sur le mur du sous-sol dans le jardin près de l’apothicairerie- faisait référence à un fameux
naturaliste et explorateur français. Cela occupa quelques-unes de mes heures sur Google!…
Il a donné son nom à divers insectes et animaux, du léopard de Bornéo à une chauve-souris
frugivore à nez court. Fantastique!
Mais ce qui fut sans doute le plus émouvant fut la rencontre avec le dernier survivant du
Roma, ce navire immortalisé grâce aux efforts de Mario Cappa. Il avait plus de 90 ans et
était un représentant véritablement représentatif de sa génération.
C’est en 2016 que j’ai pris ma retraite de professeur, et j’ai pu désherber presque tous les
dimanches, bien que nous ne soyons pas à Minorque à temps complet. Plus récemment, j’ai
aidé à l’entretien et au dépoussiérage de la Chapelle anglicane. Qui aurait pu penser que le
ketchup serait si pratique pour nettoyer les candélabres en laiton ?
Et réellement, j’attends comme un rêve le voyage en zodiac, qui nous transporte à l’île les
dimanches matin. Et le déjeuner que nous prenons tous ensemble est pour moi un
enchantement, et la bière de Toni qu’on déguste après une matinée passée à désherber ou à
faire du nettoyage, c’est la meilleure du monde ! J’ai eu la chance de me faire beaucoup
d’amis et c’est agréable de reconnaître des volontaires espagnols à Mahon ou à Es Castell.
Mon espagnol s’améliore progressivement et je commence à pouvoir suivre les
conversations. Et si Luis, le Général, parle lentement (?), en principe je peux comprendre ce
qu’il nous dit ! Son énergie et son enthousiasme sont très inspirants !
Ce sera émouvant de voir comment changeront les rythmes de l’île lorsque la galerie d’art
Hauser&Wirth sera installée dans l’édifice du Langara, converti en centre d’art….
définitivement quelque chose d’exceptionnel.
Alison Gurney
Professeure retraitée

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Une Britannique à l’Ile du Roi

septiembre 22nd, 2019

Je suis Anglaise et résidente permanente à Minorque, volontaire à l’Ile du Roi depuis trois ans. Je ne voulais pas travailler au jardin, comme la majorité des Britanniques, et j’ai trouvé un travail à l’atelier de restauration de meubles, d’objets d’éclairage et d’autres choses.

Lorsque je suis arrivée la première fois comme volontaire à l’Ile du Roi, on m’a donné un travail d’aide aux travaux de construction. Je devais mettre du sable dans un seau avec une pelletée de ciment pour construire un mur. Je ne pèse que 40 kg et je n’ai pas de force, de sorte que j’ai décidé que ce n’était pas un travail pour moi !

Néanmoins, je suis revenue la semaine suivante et je leur ai demandé si je pouvais travailler dans la salle des dentistes, puisque la Fondation venait de recevoir un grand nombre d’équipements dentaires anciens qui devaient être nettoyés et polis avant d’être présentés au public.

J’ai effectué ce travail pendant des semaines et ensuite j’ai commencé à travailler à la restauration d’une table de dentiste avec ses tiroirs. Je n’avais jamais rien fait de tel, mais j’ai réellement apprécié ce défi et j’ai appris beaucoup de mes collègues et des autres volontaires. Deux mois plus tard, la table était étincelante après sa restauration. Ensuite, je me suis attaquée à un fauteuil de dentiste.

Ce travail de restauration m’a tellement enchantée que j’ai demandé si je pouvais travailler à l’atelier et on m’a présenté une adorable fille appelée Tonia qui m’a accompagnée à l’atelier de restauration.

Mon premier projet a été une table. C’était la première fois que je m’essayais à ce type de travail. On m’a montré à utiliser du verre pour enlever le vernis du bois. On n’utilise pas de produits chimiques à l’atelier, juste des méthodes naturelles. Après avoir éliminé le vernis, j’ai appris à utiliser la pâte pour éliminer les vers de bois (vrillettes), ensuite à passer le papier de verre et enfin à revernir et cirer.

J’ai également restauré des lampes en laiton en employant du papier de verre fin et une baguette en métal.

En plus du travail, des voyages culturels sont organisés de temps à autre pour les volontaires, aussi bien à Minorque qu’ailleurs, en rapport avec l’histoire de l’Ile. Nous avons un déjeuner annuel à Noël, une réunion générale annuelle de la Fondation avec un repas à base de paëlla. Et bien sûr chaque semaine nous nous régalons du fameux petit déjeuner après le travail, préparé par Marga et ses collègues collaboratrices culinaires.

L’Ile du Roi m’enchante parce qu’il y a un mélange de nationalités qui travaillent pour le bien de l’Ile et qui ont un objectif commun: réhabiliter avec succès ce que fut l’Hôpital Naval, sous l’égide de la Fondation Hôpital de l’Ile du Roi.

Nous travaillons en famille. Mon expérience à l’atelier est que nous travaillons ensemble, nous nous entraidons, et notre chef, Pepe, sait tout ce qu’il faut savoir en matière de restauration de toutes sortes de choses !

Je vais à l’Ile tous les dimanches et, à moins que je ne sois malade, je n’ai pas manqué un jour. C’est une forme de vie et un grand privilège de faire partie de la Fondation pour rendre ce vieil hôpital tel qu’il a été.

C’est merveilleux de faire partie d’un groupe de personnes qui travaillent ensemble pour redonner vie à l’Ile du Roi.

Pour terminer, je veux évoquer les amis que je me suis faits, aussi bien espagnols qu’anglais, autour d’un intérêt commun … l’Ile du Roi.

Victoria Dowie

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Électricité, électromédecine et l’Île-du-Roi

6 septembre 2019
Je me souviens que, dans mon enfance, il y avait à la mairie, de chaque côté de l’escalier principal, des extincteurs d’incendie, triangulaires, en rouge, comme principal dispositif de prévention des risques. Dans les deux cinémas également. Maintenant ils feraient joli, mais comme des pièces historiques….
Ceci fait suite au commentaire de don José à la suite de la récente et magnifique nouvelle de la réanimation réussie d’un voyageur en arrêt cardiaque subit, alors qu’il attendait son embarquement à l’aéroport. Les manoeuvres initiales de RCP (Réanimation Cardio-Pulmonaire) furent primordiales; on les connaît comme la séquence de gestes à appliquer. La nécessité d’une défibrillation (décharge électrique) s’impose parfois comme un commandement pour obtenir que l’armée des myofibrilles du muscle cardiaque reprennent un ordre synchronisé afin de redémarrer la circulation sanguine, ce qui se produit depuis l’étape du foetus, et jusqu’à ce que Dieu en décide! C’est bien une machine!
Ce fut une grande avancée que l’invention du défibrillateur, et une grande innovation que de changer les mentalités et de laisser ces appareils accessibles, plutôt que dans un placard fermé à clé, avec des batteries pour ne pas dépendre d’une prise, et d’y ajouter quelques instructions verbales qui disent au novice quoi faire et comment le faire. Bien sûr, il vaut mieux ne pas être aussi novice et l’avoir appris.

Comme l’Ile du Roi est un lieu qui accueille beaucoup de monde, il est nécessaire d’avoir des moyens d’assistance en cas de problème. Et nous les avons. Nous avons eu des fractures, occasionnelles, que j’ai eu l’occasion d’infiltrer, de réduire et d’immobiliser (côtes de notre inoubliable Bep, col de l’humérus récent, poignet, et une autre dont je ne me souviens pas car je n’étais pas là), mais nous avons aussi un DEFIBRILLATEUR AUTOMATIQUE avec sa batterie autonome, son système de consignes, et d’autres accessoires, complétés par un laryngoscope et ses tubes d’intubation dorés et nasotrachéaux, des tubes Magyll pour maintenir le passage de l’air et même un sac Ambú avec son masque pour maintenir la ventilation assistée manuellement, en plus du sérum, du compte-gouttes et des médicaments antiarythmiques, le tout en cas de besoin. Il n’a pas été nécessaire et ce serait préférable qu’il ne le soit pas, comme les extincteurs de la Mairie de ma ville.
Mais s’il le fallait, tout se trouve dans le kit de premiers secours, bien visible, révisé périodiquement, et complété par deux sessions d’enseignement- démonstration, dans la Chapelle aux volontaires qui voudraient l’apprendre (« per lo que fós »), et que nous allons répéter cet automne. Car tout cela avait commencé à San Luis, lors d’une session que nous allons appeler « zéro » parce qu’elle ne s’est pas faite sur l’île, grâce à la détermination du Dr Antón Soler, auquel nous devons les démarches pour obtenir le défibrillateur. Elle a duré moins longtemps que ne le recommande le protocole de la formation en RCR, qui sont des choses tout à fait codifiées. Je conseille à tout le voisinage de l’Isla Grande, Minorque, de les suivre, chacun dans sa propre localité, car actuellement ces appareils sont déjà installés dans des lieux publics et des lieux de passage très fréquentés, pour être plus facilement accessibles et visibles lorsque les nerfs imposent une urgence et commandent des gestes inutiles. Et si une mairie ne les a pas, demandez-les parce qu’elle ne pourra pas avancer de raisons pour ne pas les acheter. Comme pour les extincteurs : il faut les avoir, quitte à ne pas s’en servir.
Ce n’est pas un conseil de la D.G. de la Circulation, mais les ambulances le donnent. Et quelques bus de certaines villes aussi. Pour les avoir à portée de main…
Note : de l’ « Electromédecine II », pour quand on me laissera en écrire plus. Je vous remercie. Et demandez une démonstration de RCR adéquate.
Miquel Timoner Vidal
Médecin

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LE PORT DE MAHON A L’ILE DU ROI

10 août 2019

Cette année, il y aura déjà dix ans qu’Oscar, mon grand-père, nous a présenté l’Ile du Roi, à ma famille et à moi-même; par la suite, il a parrainé une salle, dédiée aux migrations minorquines. Peu à peu, tout comme l’île en général, cette salle s’est agrandie et améliorée

A ce moment-là, l’expansion se centre sur la réhabilitation du premier étage de l’ancien hôpital, qui jusqu’à alors était resté inaccessible au public. Tout  comme le rez-de-chaussée est dédié à Minorque et à la vie de l’hôpital, ce nouvel étage va devenir le Centre d’interprétation du Port, dont on n’a jamais parlé avec un tel luxe de détails jusqu’à aujourd’hui.

Il a donc l’ambition de faire connaître le port: sait-on comment il fonctionne? Avez-vous quelquefois examiné ces lumières vertes, rouges et jaunes, et la blanche, disséminées dans le port? Notre objectif est de doter le Centre d’Interprétation d’un modèle à l’échelle du port qui permette d’observer en détail tous les signaux maritimes – plus de trente- avec les éclats intermittents des bouées, les occultations, les balises des pontons, et jusqu’à la balise directionnelle de la casa Venécia.

Ce modèle servira à expliquer la manière de manœuvrer, entrer et sortir en bateau, bien sûr à l’aide d’outils modernes comme le GPS, et aussi à faire comprendre la complexité de la signalisation du port.

A cet effet, j’ai d’abord monté un prototype de la signalisation des environs de l’Ile du Roi, qui a été présenté à l’hôpital le 30 juin dernier. Nous sommes très reconnaissants qu’il ait reçu un accueil aussi positif, l’idée a plu pas mal, et ceci nous motive à en préparer une version à présenter au public.

Pour donner une idée de sa manière de fonctionner, ce prototype a été construit avec un circuit utilisant la technologie appelée Arduino, ce qui permet de créer et programmer électroniquement, avec des outils à la fois puissants et simples. Par exemple, ici la base n’est rien de plus qu’un petit « chip » avec un programme, qui pilote des leds correspondant aux huit signaux contrôlés sur ce premier module.

Notre objectif est d’étendre l’idée de ce prototype à un modèle complet conçu à une échelle approximative de 1:1000, c’est-à-dire qu’il aura à peu près six mètres de large pour deux et demi de haut. Il est possible qu’à l’écrit on ne se rende pas bien compte, mais rien que de voir le prototype fonctionner donne déjà une idée de ce qui est nécessaire pour que le port soit opérationnel. Si rien qu’ainsi on ressent déjà les choses, on peut imaginer ce que le produit final permettra de voir.

Nous espérons qu’avec l’aide des volontaires, des organismes officiels et des entreprises, sur laquelle nous comptons déjà aujourd’hui, et que mon grand-père et moi remercions, nous puissions réaliser ce projet et ainsi faire en sorte que tout le monde parvienne à apprécier cet aspect fondamental du port.

  1. Bernat Rosello Sbert

Etudiant en Ingénierie de Telécommunications

 

 

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Retours

27 juillet 2019

Il y a des jours dont il est indispensable de parler à l’Ile du Roi. Le mercredi 17 juillet dernier a été l’une de ces journées, bien que l’histoire vienne de loin.

Perdus dans l’histoire des années passées, les matériels que nous avions accumulés sur l’Ile nous ont rendu bien des services en leur temps:

– un groupe électrogène venant des Travaux des Ports (l’actuelle Autorité Portuaire) nous a fourni pendant six ans de l’électricité pour les toilettes et l’éclairage nocturne. Il était alimenté au gasoil cédé par la Base navale, que nous allions chercher dans des bonbonnes de plastique qui, une fois transportées par bateau, débarquées et déposées au pied du groupe, servaient à remplir la citerne avec la vieille technique du tube aspiré par la bouche, que d’aucuns appellent « tue-les-vers« .

– un autre groupe plus petit, don de la Cova d’en Xoroi, que nous gardions en réserve et qui n’a jamais servi.

– deux transformateurs donnés par CHL , provenant de ses installations de Cala Figuera. L’un  des deux nous a été bien utile sur l’Ile. Le second ne nous a jamais servi.

– une échelle articulée de pompiers, cédée par notre Mairie, qui a rendu bien des services pour le nettoyage des gouttières et des corniches de toit ; d’habitude, c’était Gonçal Segui qui y grimpait pour effectuer ce travail.

Tout cela a été réembarqué hier, direction la casse, sauf l’échelle que quelques pompiers aguerris ont récupérée pour leur musée et ont emportée sur une remorque.

Evidemment, on a ressenti de la  nostalgie en voyant comment ces matériels qui nous ont aidés à grandir et à nous consolider sont allés directement à la ferraille. Mais c’est la vie.

Les nouvelles générations qui utilisent couramment des robinets, des prises de courant et des connexions ne comprendront pas ce que tout ce matériel et son emploi ont signifié.

Nos plus sincères remerciements aux donateurs du passé, à ceux qui l’ont entretenu et utilisé. Nous tâcherons de faire en sorte que leur souvenir ne se perde pas dans l’oubli, plus comme symbole que comme matériel condamné à vieillir et mourir. Comme nous-mêmes.

Association « Amics de l’Illa de l’Hospital« 

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L’Ile du Roi à la Fondation Reynolds

16 juin 2019

 

Le samedi 25 mai , les volontaires de la Fondation Amigos de la Isla del Rey ont visité la Fondation Reynolds.

La majorité d’entre nous ne la connaissaient pas et certains ne savaient même pas qu’elle existait, ni qu’une plaque indiquait un trésor caché derrière une porte verte.

La FR a son siège dans deux maisons anciennes et seigneuriales de la rue Isabel II, et certains de ses murs forment une partie de la muraille médiévale de Mahon.

 

Ce qui est certain, c’est que notre surprise et notre admiration furent grandes. Les explications qui vont suivre ne se font pas dans un ordre de priorité ou d’importance.

A la FR, l’ancien et le moderne cohabitent, ainsi que l’international et le local. Par exemple, la grande fresque murale de la salle des concerts (XIXème siècle) découverte après l’achat de la maison et soigneusement restaurée, ou l’énorme source de lumière provenant de la double baie vitrée réalisée par Zulema Bagur (XXIème siècle).

Pendant le parcours à travers l’édifice et l’abondante collection particulière, on respire l’éclectisme, l’ouverture d’esprit, la curiosité pour tous les courants artistiques, les préoccupations intellectuelles et l’amour pour Minorque.

Ce qui nous surprend aussi, c’est que cette Fondation privée d’un mécène anglais soit précisément située à Mahon et qu’elle ait pour objectif l’aide et le financement des jeunes artistes de Minorque (artistes plasticiens et musiciens) et fasse partie de l’offre du programme Salut Jove pour les étudiants de lycée; actuellement, elle finance aussi un programme de gravure avec l’Ecole d’Art de Mahon. On admire cette générosité et la contribution discrète à la vie culturelle et sociale de notre Ile.

L’objectif de la Fondation de l’Ile du Roi est la restauration du patrimoine architectural historique de l’Ancien Hôpital, un travail constant et discret de volontaires de toutes les nationalités. L’objectif de la FR se porte sur les jeunes artistes locaux, grâce à la contribution d’une seule personne étrangère.

Nous sommes certes très différents mais ensemble nous cherchons à améliorer notre petite société minorquine, et à contribuer à un monde meilleur.

Enriqueta Sobrino Gonzalez

Professeur d’espagnol

 

 

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VOYAGE A HANOVRE
29 mai 2019
Rita Pabst, qui a été la chroniqueuse officielle de notre voyage à Hanovre, a appelé son premier récit : « La petite grande aventure » (5 mai), et le second : « Une rue Port Mahon à Aerzen » (7 mai).Elle reflétait fidèlement ce qu’a vécu sur sa terre natale, où il a passé ses premières années, ce jeune aumônier militaire de 26 ans appelé Lindemann qui, un jour, embarqua avec un bataillon hanovrien, cap sur Port Mahon.
Ce pasteur protestant, fils d’un autre pasteur réputé de l’église d’Aerzen, eut l’incroyable énergie de relater non seulement le voyage en 1775 de ces 1400 personnes -les soldats et leurs familles- mais aussi de décrire jour après jour le siège de San Felipe (1781-1782), et enfin de laisser une description complète de Minorque dans un troisième livre.
Ces trois oeuvres parurent entre 2002 et 2007, grâce aux efforts de Lothar Pabst, grâce aussi aux capacités d’investigation de Wilfred Zhier et aux connaissances de Tomas Vidal Bendito sur Minorque, bien soutenus par l’IME.
Sur ce chemin de mémoire nous accompagnaient Wilfred et ses 84 ans, deux fils de Lothar -Joaquin et Rita- et la veuve de Tomas, Rita Pons. On ne pouvait rêver meilleurs témoins, lorsqu’en plus Matias Rotters s’était inscrit au voyage. Le Consul d’Allemagne, Klaus Briegel, ne put finalement pas se joindre à nous, en raison du décès d’un membre de sa famille; mais il s’est cependant occupé d’organiser les rencontres. Un autre volontaire de l’extérieur, Alfredo Fenollosa, nous a rejoints depuis sa résidence en Suisse.
Je dois souligner la bonne ambiance qui régnait entre les visiteurs et leurs hôtes, le repas au siège même de la Mairie de Hanovre, la visite au Musée d’Etat, le privilège d’avoir découvert dans ses archives une silhouette de Lindemann et de voir une copie de son acte de naissance, que nous avons vérifié l’après-midi à Aerzen même, dans l’église où il fut baptisé.
Berlin nous attendait. Et ne nous a pas déçus. Riche en promenades, en parcs et en musées, la capitale de l’Allemagne réunifiée nous a accueillis sous un beau temps et une magnifique ambiance. Il manquait des heures à beaucoup de nos explorateurs pour visiter tant de musées; pour d’autres, il y avait trop de kilomètres à faire pour parcourir à pied ses monuments. L’Ambassade d’Espagne nous a aidés et a surtout facilité une visite du Bundestag. Devant les longues files de visiteurs qui attendaient leur tour pour entrer, quinze Minorquins eurent le privilège d’entrer par la porte Est et d’être merveilleusement guidés sur tout le parcours. Il était impératif de monter vers la coupole de verre qu’a dessinée Norman Foster pour « rendre transparente » cette Institution, rapprocher les députés et le peuple. Trois millions de visiteurs par an: cela certifie que l’objectif est atteint.

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La Sirène et beaucoup plus

10 mai 2019
Il y a trente ans, en 1989, moi, Leonardo Lucarini, j’ai fait ma première exposition de sculpture à Mahon, dans la salle « Sa Nostra », en l’église de Sant Antoni. Ce qui pourrait avoir été une exposition s’est transformé en un moment d’une énorme importance dans mon parcours professionnel et même mon itinéraire de vie, grâce à une série de circonstances favorables. Ces circonstances ont été: dans cette exposition, j’ai inclus une sirène pensive et mélancolique assise au bord de la mer; le port de Mahon commençait sa rénovation et le maire de Mahon de cette époque, Borja Carreras, assistait à l’exposition. Le résultat fut une commande d’une sirène en bronze, de plus grande taille mais dans la même attitude, pour la placer dans le port: la Sirène MO. La sirène (« sirenita » comme l’appellent affectueusement beaucoup de Mahonnais, malgré le fait que c’est une femme faite et droite) fut très rapidement acceptée par la ville et s’est presque transformée en peu d’années en son symbole.

Bien que ce ne fût pas la première fois que je venais à Minorque. En 1985, j’y arrivai pour la première fois et déjà avec la vue de la Mola émergeant de la brume à l’entrée du port de Mahon, je fus immédiatement captivé (cette image a donné lieu à ma sculpture « Aube »); la variété des paysages en si peu d’espace, la lumière, la mer si limpide, les plages, etc, me fascinèrent, et dès lors j’ai été totalement fidèle à l’île pour mes vacances. Quelques années plus tard, j’ai acheté une maison à Mahon, et j’ai fini par y transporter ma résidence à l’âge de la retraite.
Mais pour en revenir à l’exposition de 1989, la commande de la Sirène MO et son succès produisirent un changement important dans la manière d’aborder mon travail: à partir de cette expérience, je me suis beaucoup plus intéressé aux sculptures plus grandes, destinées à être installées dans des espaces publics et accessibles aux spectateurs. Un exemple, « Na Gracia y en Lucas » située sur l’Esplanade de Mahon. Sur un plan personnel, l’acceptation de la sirène par les Mahonnais a renforcé mon attachement pour l’île et cela a inspiré beaucoup de mes oeuvres, la « Menorca », une femme qui se transforme en taula et qui est installée dans l’escalier de l’ancien siège du Conseil Insulaire de Minorque, le « Baigneur », l’ « Aube » (déjà mentionnée), et les sculptures « Niobé », « Galatée » et « Andromède » dont le prétexte narratif est mythologique, mais l’inspiration en est méditerranéenne et minorquine.
Le fait que, plus tard, la Mairie de Mahon ait décidé de remettre chaque année au crieur public des fêtes une copie réduite de la sirène, faite par moi-même, a encore augmenté ma reconnaissance.
En contrepartie à tant d’affection, j’ai décidé de donner à la Mairie l’original en plâtre de la Sirène MO. Il faut rappeler que presque toute sculpture en bronze, comme celle qui se trouve au port, est une copie faite par une entreprise de fonderie à partir d’un original normalement en plâtre, qui est ce qu’a réellement modelé l’auteur. Il arrive que l’original soit abîmé dans le processus de fonte, mais la plupart du temps, non, et l’auteur conserve l’original. J’ai toujours pensé que cet original de la Sirène MO devait se trouver là où on l’apprécie tant, et le moment est venu de réaliser ce souhait.

La Mairie s’est montrée enchantée de cette offre mais elle avait quelques hésitations sur l’endroit où l’installer. Le hasard intervint une nouvelle fois: lors d’une visite à l’Ile du Roi pour connaître le magnifique travail de restauration que l’on y mène avec succès, j’ai eu l’occasion de parler avec les responsables de la Fondation de l’Hôpital de l’Ile du Roi, Luis Alejandre et José Barber qui m’ont offert d’installer la MO à cet endroit, de manière permanente. Naturellement, le cadre me parut spectaculaire et je n’ai pas hésité un instant à accepter l’offre si la Mairie y consentait; mais j’ai constaté que l’espace était très grand et que la sirène devait être entourée par davantage de sculptures. C’est pourquoi j’ai décidé d’élargir mon offre en cédant vingt autres sculptures, de différentes tailles et de matériaux divers, qui pourraient donner une vision plus riche et plus complète de mon oeuvre et de son évolution. Présenté à la Mairie, mon projet reçut de nouveau un accueil enthousiaste de la part de la Mairesse Contxa Juanola et du conseiller Hector Pons, et ensuite de tout le Conseil municipal. Mais ils ont ajouté une idée très intéressante : avant d’emmener les sculptures à l’Ile du Roi, il semblait nécessaire de présenter ces oeuvres à Mahon et ils ont proposé d’organiser au préalable une exposition à Ca’n Oliver.
Et nous voici ce 9 mai, où l’on inaugure l’exposition des sculptures de Leonardo Lucarini à Ca’n Oliver; c’est ici que se trouvent celles qui iront ensuite à l’Ile du Roi et qui y resteront exposées de manière permanente, ainsi que d’autres oeuvres de ma collection particulière que j’y ai ajoutées. Je me sens extraordinairement reconnaissant à l’égard de la Mairie de Mahon et de la Fondation de l’Hôpital de l’Ile du Roi d’accueillir mon oeuvre et de permettre de la laisser entre les mains des Mahonnais, en espérant qu’elle recevra le même accueil et la même acceptation que le reste de mes oeuvres dans l’île.
Leonardo Lucarini Gobantes
Sculpteur